Savoir(s)

Quand j'étais étudiant à l'Université de Bretagne Sud, j'ai découvert dans une salle de TP un logiciel de modélisation 3D de molécules. J'ai trouvé ça fascinant et ça m'a donné envie de travailler dans ce domaine. 30 ans plus tard, je code ce type de logiciel !, résume Sébastien Le Roux. Depuis une quinzaine d'année, ce spécialiste de chimie du solide et des matériaux désordonnés consacre la majeure partie de son temps au logiciel atomes, qu'il a entièrement développé.

Travailler en solo n'est pas nécessairement idéal, surtout quand on a davantage un bagage de scientifique que de développeur. Pour Sébastien Le Roux, aller chercher de l'aide est essentiel pour ne pas faire d'erreurs, ne pas perdre de temps ou passer par des moments difficiles. C'est utile de savoir qu'il y a une communauté qui peut nous aider, à qui on peut poser des questions . À l'occasion de l'Open Access Month 2022, il prend contact avec Noémi Cobolet, chargée de mission science ouverte de l'université. À son souhait initial de faire connaître les logiciels libres développés à l’université, va rapidement s’ajouter celui de fédérer une communauté.

Deux rendez-vous par an

L'enjeu est de faire se rencontrer les scientifiques qui codent des logiciels de recherche. Il faut qu’ils se connaissent et s'entraident. Il faut qu'ils puissent exposer leurs problématiques de développement au-delà de leur labo et de leur discipline, mais aussi échanger avec des experts, plaide Sébastien Le Roux. Les rencontres des logiciels libres de recherche qu'il a initiées se déroulent à raison de deux rendez-vous par an depuis l’hiver 2023. Chaque édition propose des conférences, des présentations de logiciels développés localement, des retours d'expériences ou bien encore des ateliers.

Depuis l'entrée en vigueur des plans nationaux pour la science ouverte, en 2018, les développements informatiques menés dans le cadre d’activités de recherche ont vocation à être réalisés sous forme de logiciels libres. En suivant ces principes et en ayant recours à des formats de données ouverts, les scientifiques sont plus à même de conserver la maîtrise des données scientifiques qu'ils produisent. Pour coordonner les actions en la matière à l'échelle du site, Sébastien Le Roux a également créé un groupe “Codes sources et logiciels de recherche à l'Université”.

L'impact sociétal important des logiciels développés à Strasbourg

Ses initiatives ne s'arrêtent pas là. En octobre dernier, il est devenu membre du Collège codes sources et logiciels du ministère de l'Enseignement supérieur et de la recherche. Cet organe rattaché au Comité pour la science ouverte, impulse et soutient des projets qui s'inscrivent dans l'axe logiciel du deuxième Plan national pour la science ouverte. L'un de ses objectifs est de mettre au point un catalogue national des logiciels issus de la recherche.

Un catalogue que Sébastien Le Roux voudrait bien imiter à l'échelle locale. Il se passe des choses en informatique à Strasbourg ! Il y a des logiciels incroyables conçus à l'université, qui ont, pour certains, un impact sociétal important. Mais les développements réalisés ici ne sont pas suffisamment valorisés, explique le physico-chimiste. Il y a nécessité de mettre en avant le savoir-faire local, en s’inspirant par exemple d’initiatives comme les actions récentes de l’Université de Lorraine ou du prix science ouverte du logiciel libre. 

La constitution d'un catalogue des logiciels de recherche développés à Strasbourg serait un formidable outil de valorisation, en interne comme auprès de partenaires extérieurs, source de potentielles collaborations avec des entreprises de la région. Ce catalogue pourrait être doublé d'une logithèque directement accessible depuis les ordinateurs fonctionnant sous le système d'exploitation Linux, courant dans le milieu de la recherche. Et qui sait si présenter cette vitrine aux étudiants ne pourrait pas, aussi, susciter des vocations ? La boucle serait alors bouclée pour Sébastien Le Roux.