Par Marion Riegert
Temps de lecture :

La nounou des moustiques de l’Insectarium

Des métiers atypiques au cœur de l'université #1. Amandine Gautier est éleveuse de moustiques à l’Insectarium de l’Institut de biologie moléculaire et cellulaire de Strasbourg (IBMC*), un métier peu connu qui fait lever quelques sourcils lorsqu’elle le présente. Rencontre avec cette passionnée aujourd’hui à la tête d’une vingtaine de lignées d’anophèles, le moustique vecteur du paludisme.

Box 2, la température oscille entre 26 et 28 degrés pour un taux d’humidité de 70%, il est 15h30 mais pour les moustiques anophèles élevés par Amandine Gautier c’est la nuit. Nous essayons de reproduire leur milieu naturel. Nous simulons grâce à la lumière le jour et la nuit avec des changements toutes les 12 heures, raconte l’éleveuse de l’insectarium qui officie dans l’équipe moustique d’une quinzaine de personnes.

Un métier peu connu arrivé un peu par hasard. Brevet de technicien agricole option animalier de laboratoire en poche, la jeune femme enchaine les CDD dans différents laboratoires avant d’atterrir à l’IBMC de Strasbourg en janvier 2016. C’est là qu’elle apprend à élever des moustiques.

Un repas sanguin par mois

Nettoyer les bacs, changer l’eau, nourrir les insectes… Amandine Gautier s’occupe de ses petits protégés de leur naissance à leur mort, soit au bout de 5 à 6 semaines environ. Chaque matin, elle nourrit tout ce petit monde. Au menu, des paillettes pour poissons mixées pour les larves et de l’eau sucrée pour les adultes, avec une fois par mois un repas sanguin.

Certaines lignées sont plus fragiles et nécessitent des soins différents.

Je regarde également à quel stade de développement ils sont. Dans les pans, de grands carrés d’eau dans lesquels j’élève les larves, je repère les nymphes (lorsque les larves sont recroquevillées) pour les mettre dans de nouvelles cages où les moustiques émergent. Certaines lignées sont plus fragiles et nécessitent des soins différents des autres, raconte la jeune femme qui travaille également certains week-end via un système d’astreintes.

Eviter les contaminations

Son maitre mot ? Eviter les contaminations. Blouse, changement de chaussures, charlotte… Il faut prendre quelques précautions. Bien désinfecter sa paillasse, ne pas mélanger les lignées, nettoyer le matériel. Les petits œufs noirs sont très fins, une contamination est vite arrivée, détaille Amandine Gautier qui forme également les nouveaux arrivants.

Un travail qu’apprécie la jeune femme et qui lui fait percevoir l’insecte d’un autre œil. Il permet aux chercheurs, aux post doctorants et aux doctorants de se concentrer sur leurs projets. Les moustiques sont un outil de travail très précieux dont il faut prendre soin. Parfois, quand j’en vois un qui se pose sur un mur, je regarde si c’est un mâle ou une femelle. Je sais que le mâle ne fera rien, ce sont les femelles qui piquent. Elles sont tellement petites mais peuvent faire tellement de dégâts…

*L'IBMC regroupe trois unités de recherche rattachées à l’Institut national des sciences biologiques du CNRS. Cet Institut fédératif est soutenu par l’Université de Strasbourg et l’Inserm.

Des métiers atypiques au cœur de l'université

Ils et elles sont cartothécaire, éleveuse de moustique, agent logé ou relieuse... Gardiens de trésors universitaires ou dépositaires d'un savoir rare, ils œuvrent dans des professions méconnues, souvent dans l'ombre. Cette série propose de mettre leurs compétences sous le feu des projecteurs.

Catégories

Catégories associées à l'article :

Mots-clés

Mots-clés associés à l'article :

Changer d'article