Premiers résultats pour la première caméra phénologique installée dans les Vosges
La caméra phénologique installée dans les Hautes Vosges à l’été 2022, dans le cadre du projet Phenomene, a livré son lot d’images quotidiennes. Elles ont permis à Pierre-Alexis Herrault et Damien Ertlen, chercheurs au Laboratoire image, ville, environnement (Live, Unistra/CNRS), d’observer le cycle de croissance des plantes composant les prairies de montagne.
La phénologie est l'étude de l'apparition d'événements périodiques. Pour les plantes, cela revient à étudier les transitions dans leur cycle de croissance donnant ainsi des informations sur le timing de démarrage de la saison, le pic ou bien la phase de sénescence
Durant plus d’un an, la caméra installée par Pierre-Alexis Herrault et son collègue, dans la réserve du Rothenbach, a livré cinq images quotidiennes permettant de retranscrire l’activité chlorophyllienne des végétaux, autrement dit leur productivité. Soit tout de même plus de 2 000 clichés. Une première série de données a pu ainsi être traitée donnant des indications assez intéressantes sur la fiabilité des images à retranscrire un signal cohérent. La série récoltée donne la possibilité de caractériser les différentes phases du cycle de croissance avec une très grande précision temporelle et spatiale
, résume Pierre-Alexis Herrault.
Premier constat : l’été 2022 a été très sec. Nous avons observé un pic de productivité des végétaux de la prairie dès juin contre juillet habituellement. Cela a entrainé l’avancement de la phase de décroissance de ces végétaux, intervenue plus tôt que d’ordinaire. Avec une faible productivité des plantes en juillet et août.
Un stress pour la plante
L’année 2023 a été pour sa part plutôt classique en termes de températures et d’eau. C’était très vert, ce qui contraste avec l’année 2022.
L’automne a tout de même été anormalement chaud. Au lieu d’observer une décroissance progressive depuis le pic de production des plantes, on observe un mini pic de production à la fin du mois de septembre. Ce qui veut dire qu’il y a une hausse de l’activité chlorophyllienne alors que l’on devrait observer une décroissance relativement continue.
En hiver, les premières neiges sont arrivées fin octobre, début novembre, une période plutôt classique au niveau du timing, reste pour les chercheurs à observer temporellement la couverture neigeuse avec attention. La durée de couverture est déterminante pour le stock d’eau dans le sol. Le retrait de la neige au printemps va également conditionner l’exposition de la plante au gel, ce qui peut ensuite représenter un stress pour la plante entrainant par la suite une productivité assez faible ou un ralentissement de leur croissance.
Les scientifiques souhaitent également s’intéresser à la variabilité spatiale des signaux mesurés au sein de l’image pour comprendre les stratégies mises en œuvre par les différentes populations de plantes. Toutes les informations seront ensuite transmises et croisées avec les gestionnaires du Parc régional et des différentes réserves
, précise le chercheur. Elles seront par ailleurs saisies dans la plateforme Phenocam, base de données internationale sur la phénologie de la végétation.
Des difficultés techniques
Pour capturer le signal des prairies localisées sur d’autres sites des Hautes Vosges, deux nouvelles caméras phénologiques ont été installées en octobre 2023 au Grand Ballon et au Hohneck. Un parc à gérer qui augmente le lot de difficultés techniques : Certains jours, les panneaux solaires qui servent de source d’énergie aux caméras ne reçoivent pas de lumière, il n’y a donc pas d’images. Il faut que le système se réinitialise correctement pour assurer une continuité dans la capture des photographies et les conditions météo peuvent compliquer cet aspect.
Les cartes SD doivent être récupérées par les chercheurs eux-mêmes qui se rendent sur site toutes les trois, quatre semaines. En hiver, c’est plus compliqué, la route des crêtes est fermée, nos installations sont moins accessibles
, rapporte Pierre-Alexis Herrault. Par ailleurs, les membres du projet Phenomene aimeraient mettre en place un envoi des données via le réseau téléphonique pour faciliter le contrôle et le traitement des données. Sur place, des panneaux explicatifs ont été posés permettant de sensibiliser les promeneurs et de faire de la pédagogie.
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Pour aller plus loin, lire aussi : "Dans les Vosges, des caméras à l’affût du réchauffement climatique"
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