Par Marion Riegert
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Manon Legris, MacGyver de la restauration au Musée zoologique

Embauchée en 2022 à la régie des collections des Musées de la Ville de Strasbourg, Manon Legris gère la restauration de l’ensemble des spécimens du parcours permanent du Musée zoologique. Rencontre avec cette passionnée adepte de la débrouille.

Dans les sous-sols du Musée zoologique, Manon Legris s’affaire autour de deux aigles royaux en pleine scène de combat. Entrés au Musée en 1919, ils comptent parmi les 1,2 millions de spécimens de ses réserves. Il y a un gros travail de nettoyage. Je dois aussi reprendre la peinture des doigts et du bec et traiter plusieurs rachis d’ailes cassés, explique la restauratrice qui précise que les volatiles se font faire une beauté en vue d’être prêtés au Musée d'art moderne et contemporain de Strasbourg dans le cadre d’une exposition temporaire.

Cette mission annexe s’ajoute à son objectif premier : restaurer l’ensemble des quelque 1 800 spécimens du parcours permanent du musée. Pour ce faire, la restauratrice, arrivée en 2022, a constitué une base de données avec des niveaux d’urgence. Un quart de la collection est confiée à l’extérieur. J’en suis pour ma part à la moitié des 1 200 pièces restantes. Soit environ 600 oiseaux encore à traiter.

Un « bichonnage »

Il s’agit a minima d’un « bichonnage », pour nettoyer et redonner de l’éclat à ces spécimens dont certains appartiennent à des collections de 1750. Il y a du boulot !, sourit Manon Legris qui évoque aussi des consolidations, ou encore des mises en teinte avec de la gouache, de l’aquarelle, des pastels, ou de l’acrylique, selon l’effet recherché.

Trois spécimens lui donnent particulièrement du fil à retordre dont un sanglier au museau arraché. Un nandou, sorte d’autruche, qui la mobilise pendant trois semaines. J’ai dû reprendre le dessin de chaque écaille de ses pattes. Sans oublier, un homard bleu devenu rouge au contact du formol, dont il a fallu restaurer la couleur d’origine durant une vingtaine d’heures. 

Pour l’épauler dans cette tâche pharaonique, plusieurs personnes en interne ont été formées au nettoyage. Manon Legris peut aussi compter sur l’appui de stagiaires. Ça me tient à cœur de pouvoir en accueillir. C’est une mission que j’aime partager.

Scier en évitant les vibrations

Elle se souvient ainsi d’une scène cocasse. Nous devions nous occuper d’un condor. Le fil de fer qui servait à tenir la structure lui sortait du crâne. Il fallait le scier mais en évitant les vibrations pour ne pas l’abimer. J’ai dû le tenir à bras le corps pendant que ma stagiaire s’en occupait, raconte cette MacGyver de la restauration qui découvre le métier en visitant le Muséum national d'Histoire naturelle de Paris.

Nous ne sommes pas beaucoup en France à avoir cette spécialité

J’en suis tombée amoureuse. Je me suis ensuite formée deux ans en taxidermie, puis cinq ans en restauration à Paris, avant d’exercer durant trois ans à mon compte. Nous ne sommes pas beaucoup en France à avoir cette spécialité et il y a peu de postes.

En plus du volet esthétique et curatif, la restauratrice fait également de la conservation préventive, gérer la température, la luminosité, l’humidité, les insectes dans les salles où sont exposés les collections. J’aime tout dans ce métier. Chaque spécimen est différent et a ses propres problématiques. Il n’y a pas deux jours qui se ressemblent, c’est très stimulant et enrichissant.

  • Manon Legris sera présente pour parler de son travail le lundi 17 novembre à 15h, Salle Pasteur, au Palais universitaire, dans le cadre des Conf' du lundi du Jardin des sciences de l'Université de Strasbourg

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