Par Frédéric Zinck
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Tortue cistude et zones humides : un lien fort à l’échelle de l’Europe

Depuis 2012, l’Institut pluridisciplinaire Hubert-Curien (IPHC) étudie l’écophysiologie et l’écologie des tortues cistudes en lien avec la qualité du milieu, notamment sur le site du Woerr à Lauterbourg, une zone humide restaurée. Avec le projet Emys-R, lancé en février 2022, l’IPHC coordonne aujourd’hui un programme de recherche plus vaste à l’échelle de l’Europe.

Depuis 2016, date de la troisième vague de lâcher de tortues sur le site du Woer : de nombreux individus sont sortis du bassin d’acclimatation. Des indices de reproduction en milieu naturel ont également été découverts. Récemment, un individu mâle provenant du site de réintroduction en Allemagne, à cinq kilomètres de là, a été retrouvé du côté français, explique Jean-Yves Georges, écophysiologiste et directeur de recherche à l’Institut pluridisciplinaire Hubert-Curien (IPHC), responsable du Site d'étude en écologie globale (SEEG) du Woerr et coordinateur du projet Emys-R. Des faits qui indiquent que le processus d’installation des tortues dans ce milieu naturel est en cours.

Comparer les différents modes de gestion

Avec le projet Emys-R, financé sur trois ans par Biodiversa*, l’évaluation socio-écologique des restaurations des zones humides en faveur de la réintroduction de la cistude d’Europe prend un nouvel élan en incluant le site français - Woerr, Lauterbourg – un site en Allemagne - Neuburg am Rhein – et un autre en Lettonie - région du lac Sitas, Silene.

Nous voulons extraire des déterminants communs aux différents programmes, qu’ils aient abouti ou non

L’un des objectifs du projet consiste à rassembler la littérature existante sur la restauration et l’évolution au cours du temps des zones humides. Il existe en tout une dizaine de programme de réintroduction de la cistude, de la péninsule ibérique aux pays baltes. En rassemblant l’ensemble de ces données et en comparant les différents modes de gestion, nous voulons extraire des déterminants communs aux différents programmes, qu’ils aient abouti ou non. Au final, un guide des bonnes pratiques de restauration de zone humide pour la réintroduction de la cistude pourra être édité, commente Jean-Yves Georges.

Interroger l’engagement citoyen

L’impact de la société tout comme l’implication citoyenne sont également au coeur du projet. Des séminaires publics et des ateliers participatifs vont être mis en place. Avec ce volet sociologique, il s’agit d’évaluer la perception des populations de l’usage des zones humides et d’interroger également l’engagement individuel à la protection de la nature, ajoute Jean-Yves Georges.

Inventorier la biodiversité animale et végétale

Le projet entend aborder la restauration des zones humides de manières transversales en réalisant un inventaire de la biodiversité animale et végétale sur les trois sites. La tortue est, en effet, une espèce représentée dans ces zones… parmi d’autres. La restauration est-elle bénéfique à d’autres espèces souhaitées ou souhaitables ?  Il s’agit de caractériser le passé, le présent et le futur - grâce à des outils de modélisation - des sites de restauration et de réintroduction et ainsi de réussir à faire émerger une politique cohérente, conclu Jean-Yves Georges.

* Un partenariat européen pour la diversité qui soutient des projets de recherche sur la biodiversité ayant un impact sur la société et les politiques. Emys-R est financé par l’Agence nationale de la recherche (ANR), France, VDI/VDE-IT, Germany, State Education Development Agency (VIAA), Latvia et le National Science Center (NCN), Poland.

Emys- R : explication d’un acronyme

L’utilisation du mot « Emys » coule de source puisque que le nom latin de la tortue cistude est Emys orbicularis. La lettre R quant à elle, peut être entendue comme restauration, réintroduction ou recherche. L’acronyme fait également référence au mot « émissaire ». L’objectif est de faire de la tortue cistude un émissaire des zones humides. Les zones humides souffrent d’une mauvaise perception alors que la tortue bénéficie d’un affectif très prononcé. L’image de la tortue cistude pourrait permettre d’inverser la perception négative des zones humides et de faire valoir leur importance, explique Jean-Yves Georges.

Les différents organismes impliqués dans le projet

  • Institut pluridisciplinaire Hubert-Curien (IPHC) - CNRS/Unistra, (coordinateur)
  • Laboratoire image, ville, environnement (Live) - CNRS/Unistra
  • Gestion territoriale de l'eau et de l'environnement (Geste), Ecole nationale supérieure du génie de l'eau et de l'environnement (Engees)
  • Environnement et territoires, Communauté européenne d'Alsace (CEA)
  • Loewe Center for Translational Biodiversity Genomics, Senckenberg Nature Research Institute / Goethe University / Giessen University / Max Planck Institute, Francfort, Allemagne
  • Ministère de l'environnement et de l'agriculture, administration du district de Germersheim, Germersheim, Allemagne
  • Union pour la conservation de la nature et de la biodiversité (NABU), Rhénanie-Palatinat, Mayence, Allemagne
  • Sciences et technologies de la vie, Université de Daugavpils, Daugavpils, Lettonie
  • Géographie socio-économique, Université de Gdansk, Gdańsk, Pologne
  • Systems Collective Design Lab (HIVE), Collegium Civitas, Warszawa, Pologne

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