Par La rédaction
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Vers une meilleure compréhension des mécanismes de transmission des virus Zika et de la dengue

Les moustiques Aedes sont les principaux vecteurs du virus de la dengue et d'autres arbovirus, dont le virus Zika, pour lesquels il n’existe pas de traitement. Dans une étude parue dans « Nature Microbiology », une équipe de chercheurs de l’Institut de biologie moléculaire et cellulaire*, en collaboration avec l’Université fédérale du Minas Gerais au Brésil, ont décrit l’ensemble des virus présents chez 800 moustiques à l’échelle de la planète. Ils montrent que sur les 12 virus identifiés, deux d’entre eux n’infectent pas les humains mais augmentent le potentiel de transmission des virus de la dengue et de Zika. Le mécanisme impliqué révèle l’existence d’un nouveau facteur cellulaire détourné par les arbovirus dans les moustiques.

En utilisant une technique de séquençage à haut débit de l'ARN, couplée à une analyse bio-informatique selon une méthode mise au point dans leur laboratoire, les chercheurs ont réalisé un état des lieux des virus présents chez les moustiques Aedes à travers le monde. Ils se sont appuyés sur un réseau de collaborateurs, la plupart participant au consortium européen ZIKAlliance, pour collecter plus de 800 moustiques sur 12 sites différents dans 6 pays sur 4 continents. Ceci leur a permis d’identifier 12 virus circulants, présents chez ces moustiques, dont 5 n’avaient pas encore été décrits jusqu’ici.

Deux de ces 12 virus, Phasi Charoen-like virus (PCLV) et Humaita Tubiacanga virus (HTV), ont attiré l’attention des chercheurs en raison notamment de leur prévalence élevée. Pour savoir si ces deux virus pouvaient avoir un impact sur la transmission de la dengue, les scientifiques se sont intéressés à une petite ville du Sud-Est du Brésil, Caratinga, où la dengue est endémique et pour laquelle ils disposaient d’une collection archivée d’ARNs de plus de 500 moustiques collectés à cet endroit sur une année. L’analyse a révélé une interaction des deux virus HTV et PCLV avec le virus de la dengue : les moustiques infectés des virus HTV et PCLV avaient une probabilité trois fois plus élevée d’être également infectés par le virus de la dengue.

Prévenir les épidémies

Les scientifiques ont ensuite confirmé cette observation dans l’environnement contrôlé de l’Insectarium de Strasbourg. En utilisant une modélisation mathématique, les chercheurs suggèrent que cette capacité infectieuse plus élevée pourrait multiplier le risque de transmission de la dengue et de Zika par cinq quand HTV et PCLV sont présents.

La dengue est la maladie infectieuse virale transmise par les moustiques dont la fréquence augmente le plus rapidement dans le monde, causant actuellement 400 millions de nouvelles infections chaque année

En étudiant l’expression des gènes dans les moustiques infectés par la dengue, en l’absence ou en présence d’HTV et PCLV, les scientifiques ont découvert le rôle important des histones (les protéines qui s’associent à l’ADN pour le compacter et former la chromatine). Leurs résultats montrent que le virus de la dengue utilise l’histone H4 pour se multiplier chez le moustique.

Une meilleure connaissance des mécanismes moléculaires qui régissent l’interaction entre ces trois virus parait primordiale pour la suite de nos recherches. Comprendre ce qui favorise la transmission des virus Zika et de la dengue pourrait permettre de proposer des stratégies plus efficaces pour diminuer la transmission du virus à l’humain, et de limiter, voire prévenir les épidémies, conclut João Marques, nouvellement recruté comme directeur de recherche Inserm et dernier auteur de l’étude.

*L’IBMC regroupe trois unités de recherche rattachées au CNRS. Il est soutenu par l’Université de Strasbourg et l’Inserm.

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