Par Marion Riegert
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Quels risques à la centrale nucléaire de Zaporijia en Ukraine ?

L'Agence internationale pour l'énergie atomique (AIEA) est arrivée le jeudi 1er septembre à la centrale nucléaire de Zaporijia dont les alentours font régulièrement l’objet de bombardements. Thierry Foehrenbacher et Denis Oster, tous deux ingénieurs en radioprotection à l’Institut pluridisciplinaire Hubert Curien (CNRS/ Unistra), nous expliquent les risques que représentent ces attaques.

Le risque de type Fukushima

Le principal risque qui concerne les centrales nucléaires est la perte du refroidissement du réacteur qui se fait grâce à de l’eau circulant au moyen de puissantes pompes, explique Thierry Foehrenbacher. Cette eau permet d’extraire la chaleur produite par les fissions de l’uranium 235 pour la production de l’électricité. Lorsqu’on arrête un réacteur, en introduisant dans son cœur des barres de contrôles qui stoppent la réaction en chaine, il reste une activité radioactive résiduelle due principalement aux produits de fission qui dégagent de la chaleur et qu’il faut continuer à dissiper. Si cette chaleur n’est pas évacuée, le cœur du réacteur surchauffe, peut fondre et entrainer une émission de différents gaz, dont d’hydrogène. Par accumulation, ils risquent de faire exploser l’enceinte de confinement, entrainant des rejets radioactifs dans l’atmosphère, complète Denis Oster.

Ainsi, si un bombardement venait à toucher les canalisations d’eau ou le réseau électrique, nous risquerions un incident du même type que celui qui a touché la centrale nucléaire de Fukushima. Son système de refroidissement a été mis hors service suite à l’inondation provoquée par le séisme, poursuit l’ingénieur qui précise que la centrale de Zaporijia dispose de générateurs diesel dont certains bunkerisés pour l’alimentation électrique de secours des pompes de refroidissement. En cas de perte d’alimentation extérieure à la centrale, ils permettent d’assurer le refroidissement environ 8 jours.

Le risque de type Tchernobyl

L’autre risque est celui de la détérioration de la cuve et des structures consécutif à un bombardement dans le cas d’un réacteur en fonctionnement. En France, les centrales sont dimensionnées pour résister au crash d’un petit avion, explique Denis Oster qui précise que dans ce cas la réaction pourrait se rapprocher de la catastrophe de Tchernobyl. A Tchernobyl, le cœur en fonctionnement a explosé suite à son emballement ce qui a entrainé la mise en suspension dans l’air du combustible radioactif et des produits de fission volatils qui ont touché une grande partie de l’Europe.

C’est la première fois qu’une guerre prend en otage une centrale nucléaire, avec en cas d’exactions des conséquences probables pour toute l’Europe, Denis Oster

Le risque humain et les déchets radioactifs

A Zaporijia, le combustible usagé est placé en piscine pour refroidissement et du combustible usagé « froid » semble être entreposé directement sur le site. Un bombardement sur leur zone de stockage risquerait de mettre en suspension dans l’air cette matière radioactive par incendie notamment. La zone contaminée dépendrait alors, comme dans les deux cas précédents, de la dispersion atmosphérique, précise Thierry Foehrenbacher qui évoque également le problème humain. Il y a aussi les personnes qui travaillent sur place : Est-ce que les rotations du personnel peuvent être assurées, le stress engendré par l’occupation russe ne peut-il pas conduire à des dysfonctionnements ou des prises de décisions erronées ?

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