Par Elsa Collobert
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« Le Jardin des sciences est à un tournant de son histoire »

Animé par la volonté de porter la culture scientifique hors des murs de l’université, le Jardin des sciences (JDS) affirme ses valeurs à travers un projet scientifique et culturel renouvelé, alors que se concrétisent plusieurs projets structurants – Planétarium et accueil général, Musée zoologique. Sébastien Soubiran et Christel Le Delliou, binôme à la tête de la direction depuis un an, nous en disent plus.

L’arrivée de Christel Le Delliou, en novembre 2021, a-t-elle été l’occasion d’un autodiagnostic ?

Sébastien Soubiran : L’arrivée de notre nouvelle directrice adjointe a coïncidé avec une période où notre structure prenait un virage. Nous allons enfin nous doter d’un lieu d’accueil physique, unique. Il sera adossé à l’un de nos outils-phares, le Planétarium. La construction a débuté en septembre 2020 et l’ouverture est prévue au printemps prochain. L’enjeu est d’améliorer notre identification et notre visibilité en tant que structure unique, porteuse de tout un éventail d’outils et d’interventions visant à renforcer la socialisation des savoirs scientifiques et leur mise en débat, au sein et en dehors de l’université.

Christel Le Delliou : Cela nous a offert l’opportunité de  formaliser la mission et les valeurs qui font l’identité de notre « jardin métaphorique ». Accompagnés par la Direction du pilotage et de l’amélioration continue (DPAC), nous en avons tiré un nouveau cap articulé autour de cinq axes de développement (lire encadré). Toute notre équipe y a été associée, insistant notamment sur la mise en avant de notre contribution aux grandes urgences du moment (axe 5), à travers la notion d’équité sociale et la préservation de l’environnement.

Progressivement structuré en cinq pôles, doté de services supports, notre service s’est fortement étoffé au cours des vingt dernières années, passant de 9 à 38 personnes, avec un souci constant de professionnalisation des équipes et une participation forte dans les réseaux nationaux et internationaux, soutenue par notre précédent directeur, Hugues Dreyssé. La structure qu’il a construite, avec un soutien constant de la présidence de l’université, est à bien des égards unique en France et même à l’échelle européenne.

Pourquoi cette montée en puissance ?

S.S. : Ces dernières années, l’université intensifie son attachement à faire dialoguer sciences et société, ce que l’on appelle la « troisième mission », aux côtés de la formation et de la recherche. Nous jouons un rôle à part entière dans cette volonté de l’université de renouveler son contrat social avec l’ensemble des acteurs et actrices du territoire.

Nous travaillons avec nos partenaires internes – équipe Opus*, Service universitaire de l’action culturelle, composantes… – et externes – CNRS, Inserm… – mais aussi les structures culturelles et les collectivités locales.

En restant fidèle à nos valeurs d’ouverture, d’audace, d’intégrité et d’équité, nous sommes à l’écoute des besoins et nous faisons évoluer nos pratiques, pour participer toujours plus à ce dialogue sciences et société, qui permet un partage des savoirs et qui vise aussi un développement de l’engagement citoyen.

Comment envisagez-vous votre binôme ?

C. L.D. : Être chacun issu de deux mondes différents, celui de médiation pour moi et celui de la recherche et du patrimoine scientifique pour Sébastien, nous permet de travailler de façon complémentaire.

S. S. : Nous partageons une amitié professionnelle de longue date. Cela nous permet d’avoir un dialogue constructif dans la gestion du quotidien ou pour l’évolution du service.

Au-delà de l’appellation ‘structure de médiation scientifique’, comment vous définissez-vous ?

S. S. : Initialement, le Jardin des sciences a été très identifié pour ses conférences du jeudi soir, qui existent depuis 1998. Mais notre mission va bien au-delà aujourd’hui. Nous nous définissons effectivement comme des artisans de médiation culturelle des sciences, en œuvrant à développer la rencontre, la curiosité et l’émerveillement et en participant à la compréhension des pratiques de la recherche et de leurs évolutions dans le temps. Nous développons des actions à Strasbourg mais aussi en Alsace, ce qui nous permet d’irriguer le territoire, avec une forte dimension participative.

Nous sommes aussi des acteurs du développement professionnel, en proposant des formations en culture scientifique à tous les métiers engagés dans le partage et l’éducation des sciences (notamment par la Maison pour la science en Alsace, intégrée en 2021). Egalement professionnels de la conservation, nous coordonnons la préservation et l’accessibilité du patrimoine historique de l‘université. Enfin, créateur d’espaces de dialogue et débat, nous rapprochons les acteurs et actrices de la recherche et les habitants et habitantes du territoire, pour les faire dialoguer et s’enrichir mutuellement.

Les partenaires institutionnels – Ville, Région, Collectivité européenne d’Alsace – nous font confiance, reconnaissent notre expertise et soutiennent financièrement nos projets : notre convention de partenariat avec le rectorat a récemment été renouvelée.

L’ouverture du Planétarium et de l’accueil général est un projet structurant. Y en a-t-il d’autres ?

S.S. :
Le Musée zoologique, un équipement très apprécié des Strasbourgeois, et en cours de rénovation (Opération Campus) en partenariat étroit avec la Ville de Strasbourg (Direction des musées) avec qui l’université assure la gestion partagée. Il rouvrira avec une scénographie repensée en 2024. Nous élaborons également avec Mathieu Schneider une nouvelle stratégie pour la gestion et l’accessibilité des musées et collections à l’université. Ce thème a d’ailleurs été choisi par la Maison interuniversitaire des sciences de l'Homme-Alsace (Misha) pour fêter ses 20 ans en 2022 et a fait l’objet de plusieurs expositions et d’un colloque, les 21 et 22 novembre dernier.

C.L.D. : Nous avons en effet un enjeu fort après l’ouverture du Planétarium, celui de créer, aux yeux des publics, le Jardin des sciences, comme le quartier de culture scientifique au sein du campus historique, où cohabitent le Planétarium et d’autres lieux culturels, tels que les musées, et où on vient pour assister à un spectacle, un atelier, rencontrer les acteurs du monde scientifique ou tout simplement flâner dans les jardins.

Première étape avec le Planétarium au printemps 2023. L’idée est de monter progressivement en puissance, en gardant la spécificité de ce formidable outil de médiation avec le grand public, mais aussi de formation et de recherche, à travers le Centre de données astronomiques (CDA). Nous visons 80 000 visiteurs annuels, contre 30 000 pour l’ancien, qui vient de fermer.

Le projet a aussi très tôt été pensé comme un lieu possible de collaborations avec les partenaires culturels du territoire. Les possibilités sont, peut-être pas infinies, mais très ouvertes !

* Le projet Opus, pour « Open University of Strasbourg », est porté par le vice-président Culture, sciences-société et actions solidaires, Mathieu Schneider ; et le vice-président Relations avec le monde socio-économique et valorisation, Michel de Mathelin

Les 5 axes stratégiques

  1. Un lieu muti-sites de médiation 
  2. La médiation humaine au service d’un lieu vivant
  3. Un patrimoine universitaire accessible
  4. Le Jardin des sciences, animateur de territoires
  5. Un engagement responsable pour l’équité sociale et la préservation de l’environnement

5 axes stratégiques qui guident les actions, et 4 axes de développement qui soutiennent les ambitions des actions : le JDS au cœur d’écosystèmes variés ; une notoriété amplifiée ; des pratiques professionnelles évolutives ; un modèle économique consolidé.

Un binôme à la direction du Jardin des sciences : biographies express

Christel Le Delliou (directrice adjointe) : diplômée en géophysique de l’École et observatoire des sciences de la terre Eost (ingénieure géophysicienne), elle intègre le Vaisseau en 2005, qu’elle quitte en 2021. Elle s’y occupe des évènements et des expositions, avant d’en devenir responsable du service culturel et adjointe à la directrice. Mais avant cela, elle débute sa carrière comme Attachée temporaire d’enseignement et de recherche (ATER) à la mission scientifique et technique de l’Université Louis-Pasteur et coordinatrice de la Fête de la science.

Sébastien Soubiran (directeur) : historien des sciences, titulaire d’un master en physique fondamentale et d’un doctorat en histoire des sciences et des techniques, il travaille depuis 2004 au JDS à la préservation et la valorisation des musées et collections universitaires. Il en a été le directeur adjoint aux côtés d’Hugues Dreyssé à partir de 2013. Il est président du Réseau européen pour la préservation et valorisation du patrimoine académique, Universeum.

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