Par Elsa Collobert
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« Porter la voix de l’inclusivité dans le débat public »

Théo Brisset vient de reprendre les rênes de La Station, l’association LGBTQI+ de Strasbourg. Celle-ci compte bien surfer sur la vague de la reprise post-Covid pour amplifier l’écho de ses actions. A la veille de la Marche des visibilités du 18 juin, on fait le point sur les ambitions du nouveau président, par ailleurs chargé de communication à l’Institut de génétique et de biologie moléculaire et cellulaire (IGBMC).

D’où remonte votre engagement ?

55 % des personnes membres de la communauté LGBTQI + déclarent avoir déjà été agressées

Encore aujourd’hui, plus d’une personne sur deux membre de la communauté LGBTQI + 1 déclare avoir déjà été agressée2. Et en tant que témoin, je pense que le taux passe à 100 % ! La majorité de ces faits reste impunie.

Moi-même victime d’agression homophobe en 2018 et empêché de porter plainte, je souhaitais que cette situation absurde et révoltante ne se perpétue pas. Je me suis donc rapproché du milieu associatif représentant la communauté LGBTQI+. D’abord à Paris, puis à Nancy, et aujourd’hui à Strasbourg, au gré de mes lieux d’études et de stages, par interconnaissances.

Ma prise progressive de responsabilités au sein de la Station a rencontré les besoins de l’association. Quand j’y suis arrivé il y a un an, j’ai eu du mal à trouver des informations pour arriver jusqu’à l'association. Il y avait un vrai besoin de communication ! Comme c’est mon métier, j’ai pris la mission en main. Et comme j’avais besoin d’une vision d’ensemble, j’ai intégré le conseil d’administration… jusqu’à être élu président, le 29 mai ! Commencer cette mission bénévole au moment du Mois des visibilités est assez compliqué, c’est une période très chargée.

Quelles sont les actions et les ambitions de La Station ?

Dans le débat public, les thématiques LGBTQI+ sont trop souvent confisquées et les enjeux manipulés

Depuis environ un an et l’allègement des restrictions liées au Covid, notre programme culturel et militant peut de nouveau se déployer : accompagnement juridique de personnes LGBTQI+ dans leurs demandes d’asile, accueil et écoute active des personnes et notamment de mineurs, organisation d’expositions artistiques… Notre café associatif est ouvert 300 heures par an, grâce à notre réseau de 70 bénévoles (200 adhérents), et à la présence sur place de notre salariée. Une chance !


Dans le débat public, les thématiques LGBTQI+ sont souvent confisquées par des personnes extérieures à la communauté, les enjeux, eux, manipulés. Je pense par exemple  à la dernière campagne présidentielle, où l’on a entendu des argumentaires eugénistes utilisés notamment par l’extrême droite contre nos communautés, notamment envers les personnes trans. Notre ambition est de nous réapproprier cette voix, et de la porter au-delà du premier cercle, au grand public.

Nous venons de lancer des interventions en milieu scolaire et auprès de publics adultes

Nous venons de lancer des interventions en milieu scolaire et auprès de publics adultes, notamment de jeunes scouts en avril 2022. Ça fait partie des actions que je souhaite développer. Essentiel, quand on sait que 27 % des agressions comptabilisés en direction de la communauté LGBTQI+ se déroulent en milieu scolaire.

Et dans un premier temps, quelles sont les priorités ?

Une des premières étapes va consister à relancer le dialogue avec le tissu associatif LGBTQI+, très riche à Strasbourg. Nous comptons déjà sept associations adhérentes.

Depuis plus de 10 ans qu’elle existe, et qu’elle est entrée dans ses locaux au 7 de la rue des Ecrivains, près de la cathédrale, notre association est reconnue à Strasbourg. Nous sommes soutenus par la municipalité, et avons déjà eu l’occasion de présenter nos activités au président de la Collectivité européenne d’Alsace (CEA), Frédéric Bierry.

Il faut continuer à nous faire connaître de ces partenaires institutionnels, associatifs aussi, et amplifier le mouvement, pour favoriser la prise en compte de nos revendications, comme l’accès à la contraception et à la PMA pour les personnes trans et à la formation des agentes et agents publics aux questions LGBTQI+.

A l’avenir, des liens pourront aussi être imaginés avec l’université, pourquoi pas, sur des thématiques que nous partageons (aide aux personnes migrantes ; violences sexistes, sexuelles et homophobes, etc.).

Le 18 juin nous serons à la Marche des visibilités de Strasbourg. Nous partageons un char avec Juin69, une jeune association d’événementiel queer et le collectif de drag2 House of diamonds.

Le mouvement de rapprochement entre nous est bien lancé !

1 Lesbienne, gay, bisexuel·le, trans, queer et intersexe
2 Selon un rapport de la Commission nationale consultative des droits de l’homme sorti le 17 mai 2022

3 Performance en lien avec l’expression de genre

Conseil lecture

Nous avons accueilli pour un événement à La Station l’autrice Garance Coquart-Pocztar, diplômée de la Haute école des arts du Rhin (Hear). Sa bande dessinée La pluie et la lumière forment l’arc-en-ciel est le fruit d’un travail d'un an mené avec l’antenne locale de SOS Homophobie. Je recommande chaudement ce livre !

Victime ou témoin de violence sexiste, sexuelle ou homophobe ?

L'université n’est à l’abri ni du harcèlement sexuel ni des violences sexistes ou homophobes.

Une cellule d’écoute et d’accompagnement a été mise en place pour aider à mettre des mots sur ce qui vous arrive, ou arrive à vos proches. Elle peut aussi vous accompagner à faire connaitre votre situation à l’établissement si vous le souhaitez.

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