Par Myriam Niss
Temps de lecture :

Collège doctoral européen d’interprétation et de création musicales : conjuguer recherche et création artistique

Depuis trois ans, le Collège doctoral européen d’interprétation et de création musicales (CDE ICM) prépare des musiciens, recrutés à l’international, à un doctorat unique en Europe dans le domaine de la pratique musicale. Sa première promotion s'apprête à être diplômée. Et donnera un concert très symbolique sur une île au milieu du Rhin, le 26 janvier.

Peu d’universités préparent à un doctorat en interprétation ou en composition musicale. A l’heure actuelle, il n’est pas obligatoire, en France, d’avoir fait une thèse pour enseigner dans une école d’art. Mais dans dix ans, on ne recrutera plus de professeurs de musique sans doctorat. Cela devient la norme, prédit Mathieu Schneider, co-responsable du CDE ICM avec son homologue allemand, Ludwig Holtmeier, recteur de la Hochschule für Musik de Freiburg (HfM).

La formation est labellisée pour quatre ans par l'Université franco-allemande

Ce collège doctoral a en effet pour singularités d’être franco-allemand et d’avoir été été créé par trois établissements : l’Université de Strasbourg (Unistra), la HfM et la Haute école des arts du Rhin (Hear), sous l’égide de l’Université franco-allemande basée à Sarrebrück, qui l’a labellisé pour quatre ans. La formation a vite connu un gros succès : La demande a explosé à un point qui nous a étonnés. Le bouche-à-oreille a fonctionné. Notre diversité nous permet de mutualiser les forces et de disposer d’un réseau important de professeurs, pour proposer à nos doctorants des formations de haut niveau qui mènent à un doctorat (PhD), se réjouit Ludwig Holtmeier. Les étudiants de la première promotion, qui a démarré à la rentrée 2020-2021, ne sont plus très loin de la soutenance de thèse, certains ayant déjà présenté leur projet artistique. Car, et c’est une autre spécificité de ce doctorat, deux rendus sont imposés : une « vraie » thèse scientifique d’au moins 200 pages et un récital.

Questionnement des pratiques et sujets de thèse inédits

Chaque année, sept ou huit nouveaux doctorants sont recrutés. En ce moment, ils sont 25 en tout, partagés à égalité entre la France et l’Allemagne. La sélection est exigeante, comme l’explique Mathieu Schneider : Ce doctorat s’adresse à des musiciens déjà confirmés, même s’ils en sont encore au début de leur carrière. L’objectif est de les former à la recherche et à la création artistique. Il s’agit de renforcer la réflexion scientifique, de questionner, d’approfondir et de transformer l’approche des pratiques musicales dans les gestes, le répertoire, la théorie de l’interprétation…

25 doctorants, partagés à égalité entre la France et l’Allemagne

En découlent des sujets de thèses inédits : un doctorant saxophoniste analyse la « comprovisation », c’est à dire ce qui relève de la composition dans une pièce improvisée et, inversement, de l’improvisation lorsque l’on interprète une œuvre écrite. Un autre sujet de thèse porte sur le métissage de la musique japonaise et de la musique occidentale, où l’on observe des pratiques différentes. Un autre encore s’intéresse au rapport entre musique et texte dans A-Ronne, une pièce de Luciano Berio de 1974. Une pianiste, partant de la transcription et de l’interprétation des symphonies de Beethoven par Liszt, étudie les timbres qui ont pu se cacher dans la partition…  Il y a de tout, la pluralité et la confrontation des disciplines, des domaines, des usages et des traditions font notre richesse, souligne Ludwig Holtmeier, en citant encore ce doctorant clarinettiste qui, graphes à l’appui, consacre sa recherche à l’évaluation des capacités de ses poumons lorsqu’il joue de son instrument. 

Ce doctorat permet aussi de constituer un vivier de musiciens qui pourront notamment se présenter aux concours des universités et devenir des enseignants-chercheurs. Nous préparons l’avenir !, conclut Mathieu Schneider.

Un concert sur une île au milieu du Rhin

Pour élargir encore les réseaux du collège doctoral, des contacts ont été engagés avec les universités suisses de Lucerne et de Berne. Deux séminaires de recherche ont lieu chaque année, en été à Freiburg, en hiver à Strasbourg. Et en janvier prochain, les musiciens et musiciennes du collège doctoral se produiront sur la scène d’Art’Rhena, dans une île au milieu du Rhin. Un événement artistique, mais aussi très symbolique.

  • Séminaire doctoral CDE ICM VI : 11-12 janvier 2024, à la Maison interuniversitaire des sciences de l'Homme-Alsace
  • Concert : vendredi 26 janvier 2024, de 20 h à 21 h 30, Art'Rhena, Île du Rhin, 68600 Vogelgrun
  • Séminaire doctoral CDE ICM VII : 27-28 juin 2024, à la Hochschule für Musik Freiburg

Catégories

Catégories associées à l'article :

Mots-clés

Mots-clés associés à l'article :

Changer d'article