Les « bad girls » du roller derby
Spectaculaire et volontiers provoc’, le roller derby est un sport qui n’en finit pas de faire des émules en France. Juliette Brangé, doctorante, et Anouk Charlot, post-doctorante, sont des adeptes, au départ pour des raisons différentes. Mais toutes deux se reconnaissent dans les valeurs fortes d’engagement et de fun du « derby ».
Dans le derby, on n’hésite pas à aller au contact, on se fait souvent des bleus.
Anouk et Juliette annoncent la couleur. Sur leur terrain - le « track » -, les joueuses enfilent casque, protège-dents, protège-coudes et protège-genoux. Mais ce n’est pas un sport de bourrin : la première chose qu’on apprend, c’est tomber, pour ne pas se faire mal, et il y a de nombreuses règles pour gérer les contacts
, décrit Anouk. À chaque match, il n’est pas rare qu’il y ait autant d’arbitres que de joueuses !
Celle qui se définit comme un fossile
du roller derby (dix ans de pratique) a testé pas mal de sports avant : judo, football, futsal. Nulle part, elle n’a retrouvé cette ambiance unique, d’ouverture et de tolérance. Ce que j’aime dans le derby, c’est que chaque physique a son atout, selon les postes qu’on occupe
. Un esprit d’inclusivité dans lequel s’est reconnue Juliette, quand elle choisit de tester ce sport, il y a un an. Après m’être essayée à pas mal de sports individuels – escalade, natation, équitation, course à pied – j’avais envie de pratiquer dans un collectif.
Séduite par le message politique porté par le derby, elle se retrouve dans l’esprit féministe qui y souffle : bien loin de mon quotidien de travail sur des chantiers d’archéologie !
s’enthousiasme la doctorante, en thèse Cifre entre le laboratoire Arts, civilisation et histoire en Europe (Arche) et Archéologie Alsace.
DIY et inclusivité
Anouk, successivement joueuse à Angers, Saint-Étienne et Strasbourg, au fil de ses études (elle est aujourd’hui post-doctorante au sein de l’Institut de recherche en médecine translationnelle et maladies hépatiques, Unistra/Inserm), a vu son sport évoluer : Au départ, c’était très “do it yourself” (DIY), avec un esprit débrouille, on s’entraînait dans des parkings, en se faisant parfois virer
. Depuis, le derby s’est institutionnalisé : On est reconnus par les villes, on a des salles pour s’entraîner
. Elle a aussi vu cette coloration engagée, dont parle Juliette, se renforcer au fil des ans, et séduire de nouvelles recrues : «Je n’y suis pas venue pour ça au départ, vraiment pour le sport. Mais ça me plaît ! Comme beaucoup de joueuses de ma génération, j’ai découvert le derby par le film Bliss (sorti en 2009). J’ai trouvé ce sport incroyable, mais je ne pensais pas que ça existait dans la vraie vie ». Quand elle découvre par hasard que c’est le cas, elle ressort de son premier entraînement enchantée : Je me suis dit que je voulais faire ça toute ma vie !
Mammouth Furie et Gluten Freak
Anouk et Juliette ont trouvé dans le derby une véritable communauté : On recroise souvent les mêmes personnes dans les événements, des liens d’amitié se créent. J’ai rencontré mes meilleures potes par le derby
, témoigne la première. Chacune et chacun se choisit aussi une identité, reflet de sa personnalité : le fameux “derby name” – Mammouth Furie pour Juliette, Gluten Freak pour Anouk. Pour certaines, il prend le pas sur notre vrai prénom, et on finit par ne plus s’appeler que comme ça !
Les matches finissent souvent en 3e mi-temps, où il n’est plus question de s’affronter, mais de faire la fête ensemble. À mes débuts à Strasbourg, toute notre équipe a été hébergée par celles qui nous recevaient, pour un match le lendemain, à Rotterdam (Pays-Bas)
, se souvient Anouk.
« C’est important pour nous d’avoir cette safe place »
Au sein du championnat, doté de trois divisions (bientôt quatre), l’équipe strasbourgeoise des « Hell’s Ass » est passée par tous les niveaux, et se maintient depuis deux ans à la 3e place de Nationale 2
. La soixantaine de membres se répartit entre championnat, loisirs et nouvelles recrues, selon les niveaux et les envies
. L’équipe qui évolue en championnat (flinta) en non-mixité choisie, sans homme cisgenre, tout comme celle, loisirs, des Bretz’Hell. C’est important pour nous d’avoir cette safe place. Après tout, ce sport a été créé par les femmes pour les femmes.
Deux autres équipes, recrues et loisirs, sont ouvertes à toustes (all gender). Dans la droite ligne des valeurs d’ouverture du derby.
En images : départ d'une action, avec les joueuses en formation « jam »
- Retrouvez les Hell’s Ass sur Instagram et Facebook
- Pour aller plus loin : Le roller derby, un sport féminin spectaculaire et impertinent
Roller derby : carte d’identité
Anouk et Juliette décrivent le derby comme « un sport de contact sur patins à roulettes, sans ballon. Un excellent mix entre stratégie, technique et agilité. La communication et l’entraide entre membres de l’équipe sont essentielles ».
Il se joue à deux équipes de dix à quinze, réparties en postes stratégiques, avec une succession d’actions (jams) en formations de cinq (4 blockers, 1 jammer).
Explications des règles du jeu avec Josiane, alias Cul-rieuse, des Hell’s ass :
© vidéo Emma Hodapp Spectacles & Smags Magazine
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