Par Marion Riegert
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150 ans de la Société française de physique, quels défis pour l’infiniment petit ?

La Société française de physique (SFP) fête cette année ses 150 ans. Une cérémonie d’inauguration a eu lieu à Paris, début janvier, lors de laquelle Caroline Collard, chercheuse à l’Institut pluridisciplinaire Hubert-Curien (IPHC – CNRS/Unistra), est revenue sur les grands défis scientifiques de la physique de l’infiniment petit. Prochain rendez-vous de la SFP en juin, à Strasbourg, avec une masterclasse sur la science ouverte.

Ma vocation est d’améliorer la compréhension du monde de l’infiniment petit, souligne d’emblée Caroline Collard, lauréate du prix Joliot-Curie 2021, spécialisée en physique des particules. Lors de cette table ronde, j’avais envie de montrer comment comprendre la physique des particules aujourd’hui. Notre vision des particules élémentaires et de leurs interactions commence à être bien ordonnée, ce qui nous donne une idée de ce qui se passe dans l’infiniment petit, souligne la chercheuse, qui revient sur le modèle standard de la physique des particules.

On peut représenter le contenu en particules de ce modèle sur trois anneaux concentriques. L’anneau extérieur et ses 12 particules de matière : six quarks et six leptons, dont quatre permettent de représenter toute la matière ordinaire sur Terre. L’anneau intermédiaire, composé de quatre particules médiatrices, qui portent les interactions entre ces éléments. Et le centre, avec le Boson de Higgs, une particule élémentaire découverte il y a dix ans, qui est responsable de la masse des particules élémentaires.

Limites du modèle et défis technologiques

Pourtant, dans ce modèle, beaucoup d’éléments font penser qu’il faut aller plus loin, souligne Caroline Collard, qui s’interroge : Quelle est la véritable nature du Boson de Higgs ? Celle des neutrinos ? Y a-t-il d’autres particules, encore inconnues, si oui quelles sont leurs interactions ? Il y a aussi la question du lien avec l’Univers et l’infiniment grand. Nous n’arrivons pas, par exemple, à expliquer l’ampleur de l’asymétrie entre matière et antimatière. Sans oublier des questions autour de la matière noire, qui compose environ 25 % de l’Univers et ne rayonne pas. On sait qu’elle existe mais comment la caractériser en termes de particules ?

Pour répondre à ces interrogations, les physiciennes et physiciens pensent déjà aux prochains accélérateurs de particules, qui imposent de nombreux développements technologiques sur les aimants des accélérateurs, sur les futurs détecteurs, sur la gestion des données informatiques... En parallèle des réflexions pour préparer le futur de la discipline, nous avons également beaucoup de travail sur nos expériences en cours, pour exploiter au mieux les données, précise Caroline Collard.

La recherche sur l’infiniment petit ne se fait pas de manière individuelle

La chercheuse travaille au sein de la collaboration internationale CMS (Solénoïde compact pour muons) sur le détecteur polyvalent du même nom, installé sur l’anneau du LHC, l’accélérateur de particules le plus grand et le plus puissant du monde, dernier maillon du complexe d’accélérateurs du Cern (Organisation européenne pour la recherche nucléaire). Objectif : Étudier les particules du modèle standard et, pourquoi pas, observer de nouvelles particules.

Les GPS n’existeraient pas s’il n’y avait pas eu la théorie de la relativité générale il y a 100 ans

L’occasion de rappeler que la recherche sur l’infiniment petit ne se fait pas de manière individuelle et se pratique sur un temps parfois très long. Il y a beaucoup de phases entre le design d’un détecteur, sa construction, les périodes de prise de données et leurs analyses. On ne peut pas prévoir l’impact de nos recherches sur la société de demain. C’est un défi important que les générations futures se rendent compte que même si l’on fait de la recherche fondamentale, il y a un intérêt pour la société. Les GPS n’existeraient pas s’il n’y avait pas eu la théorie de la relativité générale, il y a 100 ans.

Une masterclasse à l’Université de Strasbourg en juin

A l’occasion des 150 ans de la SFP, différents évènements ont lieu à travers la France, parmi lesquels une masterclasse itinérante « Édition scientifique et science ouverte » qui aura lieu à Strasbourg les 19 et 20 juin, mais aussi à Lyon, Grenoble et Marseille.

Objectif : apprendre à rédiger un article scientifique, se familiariser avec le monde de l’édition scientifique, et notamment avec les enjeux de la science ouverte. La masterclasse s’adressera surtout aux doctorants de la physique et ses interfaces en chimie, mathématiques et ingénierie et sera soutenue et créditée par la SFP, l’école doctorale de Physique et Chimie-Physique, EDP Sciences et plusieurs partenaires à l’Université de Strasbourg.

Le Congrès général de la SFP aura également lieu du 3 au 7 juillet 2023 au Centre des Congrès de la Cité des sciences et de l’industrie à Paris, proposant une session dédiée à la science ouverte (avec en invité, Alain Schuhl, CNRS).

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