Par Mathilde Hubert
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Avec les ITI, l’interdisciplinarité en mouvement

Cinq ans après leur création, les Instituts thématiques interdisciplinaires (ITI) s’affirment comme un levier de transformation pour l’Université de Strasbourg. Tour d’horizon avec Michel de Mathelin, premier vice-président et vice-président Stratégie et Innovation, en charge de leur programmation.

Quel bilan tirez-vous des ITI à ce jour ?

Les quinze Instituts thématiques interdisciplinaires (ITI) transforment durablement notre manière de faire de la recherche et de concevoir la formation. Le jury international qui a conduit l’évaluation à mi-parcours, en 2024, a confirmé leur rôle structurant : une majorité d’ITI sont pérennisés, certains s’achèvent et de nouveaux émergent. C’est un modèle exigeant mais qui illustre la volonté d’une université pluridisciplinaire, tournée vers l’excellence, l'international et les grands défis de société. Ces projets visent à structurer la recherche du site, renforcer le lien recherche-formation, favoriser l’interdisciplinarité, développer des pratiques pédagogiques innovantes et accroître l’attractivité internationale.

En quoi la programmation ITI renouvelle-t-elle le lien formation-recherche, et quels effets concrets observe-t-on ?

En associant de larges consortiums de recherche de haut niveau à des formations de type graduate program (du master au doctorat), le modèle ITI instaure un continuum formation-recherche, devenu un marqueur de notre identité. Cette dynamique se traduit par une variété d’innovations pédagogiques (projet interdisciplinaire1, méthodes de scenario planning2, binômes pluridisciplinaires encadrés par des mentors industriels et académiques3, programmes inter-masters4, internationalisation de la formation5…) qui permettent aux étudiants d’être confrontés très tôt à la complexité scientifique et de développer des compétences transversales. En recherche, chaque ITI a su inventer son mode de fonctionnement, dont on peut citer : interdisciplinarité5, attractivité de jeunes chercheurs1,6,7, partenariats clés,9,15 ou encore vulgarisation auprès d’un jeune public10,11. Cette souplesse, fondée sur la confiance accordée aux acteurs de terrain, est l’une des clés du succès.

Comment l'interdisciplinarité s'incarne-t-elle au quotidien dans les laboratoires ?

Les ITI sont aussi un terrain d’expérimentation pour repenser la collaboration scientifique5. Les chercheurs apprennent à travailler autrement, à s’interroger sur leurs pratiques et à s’ouvrir davantage à la société. Cette dynamique stimule la créativité scientifique et renforce notre impact sociétal. Un projet de recherche sur l’interdisciplinarité entre l’Université de Strasbourg et l’ETH Zürich, démarré en 2025, prend les ITI eux-mêmes comme objet d’étude.

Comment l’ouverture vers la société se traduit-elle concrètement ?

Par des dispositifs participatifs, associant chercheurs, citoyens, acteurs publics ou entreprises. Certains ITI développent par exemple des actions de sciences participatives11,12,13, de recherche collaborative territoriale15 ou encore soutiennent la création de start-ups3, 6,5.

« Les ITI ont prouvé que la liberté et la créativité peuvent transformer en profondeur notre université »

L’évaluation à mi-parcours a également ouvert une réflexion stratégique : quelle suite pour les ITI ?

Nous devons envisager leur pérennité au-delà de 2028. Faut-il élargir le modèle ou consolider l’existant ? Comment adapter nos modes de financement ? Comment maintenir l’équilibre entre liberté académique et cohérence institutionnelle ? Ces questions seront centrales dans les prochaines années. Le dispositif est inscrit dans la stratégie Cap 2030 et se connecte déjà à d’autres grands projets, notamment nationaux. Les véritables impacts se mesureront dans dix ans, lorsque les talents formés dans ces programmes contribueront à relever les grands défis de société. Nous devons oser, avancer, sortir des sentiers battus. L’immobilisme serait le plus grand risque. Les ITI ont prouvé que la liberté et la créativité peuvent transformer en profondeur notre université.

Un mot de conclusion ?

Je souhaite saluer le travail de Catherine Florentz, à l’origine de la création des ITI. Elle en a été la véritable architecte. Ces programmes sont désormais inscrits dans l’ADN de l’université. Ils incarnent notre ambition : faire dialoguer les disciplines, pour faire avancer la connaissance et former les citoyens éclairés de demain. Les ITI sont un formidable outil d’intelligence collective et un levier de transformation durable pour notre université.

15 instituts à la croisée des disciplines

Avec la mise en œuvre de quinze ITI, répartis dans trois grands domaines – sciences humaines et sociales, sciences de la vie et santé, sciences et technologies – l’université se renouvelle, pour mieux relever les défis de société.

Cette programmation d’ampleur mobilise 70 % des composantes, 75 % des unités de recherche, 100 % des écoles doctorales et comptabilise 16,3 M€ de financement par an, grâce au soutien de l’Idex et aux opportunités offertes par France 2030/PIA3 (projets SFRI-Strat’us, ExcellencES – Sens§us).

1 Le système nerveux face aux contraintes environnementales | ITI NeuroStra
2 Littérature, éthique et arts | ITI Lethica
3 Institut du médicament | ITI IMS
4 Fabrique de la société européenne | ITI MAKErS
5 Sciences quantiques et nanomatériaux | ITI QMat
6 Chimie des systèmes complexes | ITI SysChem
7 Biologie moléculaire et cellulaire intégrative | ITI IMCBio+
8 Matériaux hiérarchiques et fonctionnels | ITI HiFunMat
9 Sciences et technologies de l’information pour la santé | HealthTech
10 Mathématiques, interactions et applications | ITI Irmia++
11 Langage, inclusion, remédiation, interculturalité et communication | ITI LiRiC
12 Géosciences pour la transition énergétique | ITI GeoT
13 Histoire, sociologie, archéologie et anthropologie des religions | ITI Hisaar
14 Durabilité de l’eau et des villes | ITI Switch
15 Médecine de précision | ITI Transplantex NG

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